mardi 7 janvier 2014

Cooperation Golfe et Maghreb

Des relations ambigus



Conseil de coopération du Golfe (CCG) + le Maroc maintenant 



Les intérêts des pays du Golfe au Maghreb ne sont cependant pas identiques et divergent fortement selon les pays vers une relation de plus en plus stratégique ? Alors que les dirigeants du Maghreb et ceux du Golfe ont depuis longtemps eu des relations entre eux jusqu’à récemment, aucune région n'avait pris une importance stratégique pour l'autre. Depuis les années 2010 cependant, plusieurs pays du Golfe recherchent à avoir une plus grande influence en Afrique du Nord, en Egypte ou encore au Maghreb.

Les pays du Golfe ont démontré leur intérêt croissant vers le Maghreb à travers l’aide que les pays ont versée, par leurs nombreux investissements, voire même une intervention plus directe dans certains pays. Cependant, mal­gré des versements financiers, les pays du Maghreb, la Tunisie, la Libye, le Maroc et l'Algérie, ont eu des relations difficiles avec les pays du Golfe. Car dans ses relations délicates, bien souvent les réations interna­tionales se conjuguent avec les problématiques de politique intérieure et de nombreuses problématiques complexes (la place de l’Islam dans la société, la question autoritaire des régimes en place, l’instabilité potentielle des régimes, les difficultés économiques, et l’aversion à toute ingérence étrangère.

Un changement de paradigme depuis décembre 2010


Depuis que le monde a découvert­ stupéfait, le début d’une contestation au Maghreb après la mort de Mohamed Bouazizi en décembre 2010 - prouvant ainsi notre grande méconnaissance des pays du Maghreb, plusieurs Etats du conseil de coo­pération du Golfe ont cherché en ces temps troubles à acquérir une plus grande influence en Afrique du Nord. Pour cela, ils ont utilisé plusieurs moyens tels que les soutiens financiers, ma­tériels et politiques ( les entités soutenus dépendant de l’agenda des acteurs), cela pouvant être le pouvant etre le pouvoir en place comme des groupes révolutionnaires.

Ce fai­sant les pays du Golfe ont claire­ment montré un changement de paradigme dans leurs relations vis-à-vis du Maghreb ( relations cordiales vs. Interventionnisme ) tandis qu’un changement d échelle est à l’oeuvre. Avant le début des printemps arabes en effet l’activisme politique des pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG) l’a fait passer du Moyen-Orient au Maghreb, renouvelant ainsi l’importance stratégique de l’Afrique du Nord. Les intérêts des pays du Golfe au Maghreb ne sont cependant pas identiques et divergent fortement selon les pays malgré un contexte et des problématiques communes (stabilité, influence, investissements économiques). Par exemple, en Tunisie et en Libye, les pays du Golfe ont soutenu et souhaitaient influencer les groupes révolutionnaires qui sont devenue les nouvelles structures de pouvoir. Au Maroc, en revanche, ils ont soutenu le pouvoir en place et son processus de réforme, ils craignaient en effet 1a chute de la seule monarchie du Maghreb.

Les pays du Maghreb ont eux aussi, cherché le soutien de pays étrangers lors des troubles qu'ils ont connu depuis début 2011 mais tout en se méfiant des motifs pour lesquels ces pays intervenaient - notamment les monarchies du Golfe. En Tunisie et en Libye particulièrement la présence d'éléments soutenus par les pays du Golfe relance le débat sur la place de l'islam dans ces sociétés. Au Maroc, les liens historiques entre le royaume chérifien et les pays du CCG sont mis en avant dans des objectifs de développement économique. En Algérie, la peur de l'ingérence étrangère et des différents sur l'intervention en Libye se télescopent avec les vues communes d'écrasement de toute contestation intérieure.

Tout particulièrement, la figure du Qatar a joue sur ce thème un role de caisse de résonnance de toutes ces interrogations tant le soutien de Doha à certains mouvements islamistes - notamment issus de la mouvance des frères Musulmans - et l'importance de ces dons financiers ont généré la polarisation, méfiance et frustration politique. Bien sur les liens profonds entre les Etats-Unis et les pays du Golfe servent en quelque sorte de garde fou quant a ce que les pays du CCG peuvent accomplir, mais les relations de Washington avec Doha ou Riyadh sont souvent complexes, et chaque Etat peut s'écarter régulièrement des intérêts de ses partenaires. Ces pays se retrouvent cependant sur un certain nombre de fondamentaux communs: recherche de stabilité au Maghreb, tolérance pour l'arrivée au pouvoir de certains acteurs politiques islamistes (à nuancer fortement cependant selon les pays), et surtout favoriser l'intégration économique et régionale.

Tunisie et Libye: d'importantes relations dans le cadre des printemps


Les relations entre les pays du Golfe et celles du Maghreb, s'ils elles ont était cordiales durant de nombreuses années, ont néanmoins été délicates - les Etats révolutionnaires et socialisants comme l'Algérie et la libye ayant par exemple peu de points communs avec ceux du CCG. De plus, avec son histoire compliquée avec l'Europe, les pays du Maghreb sont restés très sensibles à toute tentative d'ingérence ou d'influence dans leurs affaires intérieures. Or les pays du Golfe lorsquíils se sont intéressés au Maghreb en raison, notamment de la possible extension des printemps arabes au Machrek (Bahrein,Yémen, Egypte, Syrie), ont suscité une large méfiance dans la population et chez certains gouvernements.

En Tunisie, les nouveaux dirigeants islamistes d'Ennahda ont activement cherché à renforcer leurs liens avec les pays du Golfe, notamment le Qatar et l'Arabie Saoudite. L'arrivée au pouoir d'Ennahda -soutenu par Doha - a permis une extension des liens entre les deux pays et l'émirat à 1a perle a accordé plusieurs prêts et dons à la Tunisie, a promis de nombreux investissements et a mis en place des accords militaires. Ces relations ont été perçues de façon mitigée par une partie de la population tunisienne qui craint que le Qatar veuille acheter 1a Tunisie. Par ailleurs, l'Arabie Saoudite, les émirats arabes unis et le Koweit ont également aidé la Tunisie, mais dans une moindre mesure que le Qatar.

En Libye, le role des pays du Golfe fut essentiel et se confond avec les enjeux de politique intérieure. Plusieurs acteurs libyens de haut niveau ont accusé l'Arabie Saoudite de soutenir la propagation du wahhabisme tandis que le Qatar fut l'un des plus actifs soutiens à l'intervention étrangère à laquelle Doha a par ailleurs participé. Cette dernière fut ensuite accusée de tenter d'obtenir des privilèges économiques - notamment dans le secteur gazier d'influencer le gouvernement libyen et de soutenir des candidats politiques islamistes aux élections pour le Congres national général de 2012 . En janvier 2013, le Premier ministre Ali Zeidan a de plus fait la déclaration officielle selon laquelle le Qatar n'interagirait dorénavant plus avec des groupes particuliers mais uniquement avec le gouvernement par des canaux officiels. Même si la Libye est riche de ses recettes issues des hydrocarbures - et a même pu aider d'autres pays comme l'Egypte en 2013 - des pays du Golfe, comme les Emirats Arabes Unis, ont cependant financé des projets.

Maroc et Algérie: des relations très différentes avec les pays du Golfe


Le Maroc a été un des pays privilégié par les pays du Golf, notamment en raison de la volonté de renforcer les monarchies sunnites (le Maroc comme la Jordanie ont été invité à rejoindre le conseil de coopération du Golfe). Le Maroc a lui vu les liens avec les pays du CCG comme un moyen de renforcer ses performances économiques. Le Conseil de Coopération du Golfe a d'ailleurs accépté l'octroi de prêts au Maroc et les saoudiens ont annoncé de nombreux projets de développement dans le pays (notamment dans les domaines de l'énergie solaire et de l'eau potable). Le Koweit, le Qatar et les émirats arabes unis ont souhaité renforcé le tourisme au Maroc. Ce dernier se trouve, néanmoins, dans une situation délicate, pris entre sa volonté de faire avancer les réformes politiques exigées par le peuple, et le fait de vouloir rassurer les pays du Golfe.

L'Algérie a d'ailleurs vu d'un mauvais oeil cette relation étroite entre le Maroc et les pays du Golfes. Malgré les bonnes relations du président algérien Abdelhaziz Bouteflika et les dirigeants du CCG, le volume des investissements en provenance de la péninsule arabique inquiète Alger. De plus, Alger a été plusieurs fois, en opposition avec des pays du Golfe, que ce soit dans le soutien à l'intervention en Libye en 2011, leur soutien aux mouvements islamistes au Maghreb, la couverture par Al-Jazeera des élections algériennes de 2007 et 2012. l'invitation du Maroc à rejoindre le CCG ou encore le traitement du dossier syrien à la ligue arabe. Enfin, les rumeurs sur un éventuel soutien qatari et saoudien aux djihadistes dans le nord du Mali ont alimenté une méfiance à l'égard des pays du Golfe. Malgré ces tensions, les relations de l'Algérie avec les pays du Golfe sont en plein essor. C'est le cas du commerce (hors secteur des hydrocarbures), de l'immobilier (avec par exemple les EAU) ou des investissements industriels du Qatar annoncés en janvier 2013.

Fonder des partenariats sur des relations économiques saines


Alors qu'au Maghreb, la situation politique semble se tasser, la promotion de relations constructives entre les pays du Golfe et ceux du Maghreb à travers les liens économiques est indispensable.

Un tel angle permettrait de mieux gérer les tensions persistantes entre les pays des deux entités mais aussi de promouvoir une certaine stabilité au Maghreb, Pour cela, cependant il faudra que l'aide économique concerne des secteurs porteurs et profite à tous les habitants des pays de l'Afrique du Nord concernés- notamment les jeunes- tandis que les pays du Golfe doivent accepter de ne plus utiliser le Maghreb comme un nouveau territoire levier de leurs propres rivalités régionales- comme cela a pu être le cas en Syrie ou en Egypte.

A l'inverse, si les gouvernements révolutionnaires de Tunisie ou de Libye encouragent les peuples des autres Etats arabes à revendiquer - notamment du Machrek- alors les tensions entre les pays du Golfe et ceux du Maghreb réapparaitront bonne et durable....

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